IMMURTALI

L'exposition Immurtali est présentée par Armand Luciani (photographe).
Cette exposition est entièrement présentée en couleur et peut comporter, en fonction du lieu qui l'accueille, entre 30 et 55 tirages.
L'oeuvre est basée sur une série de photographies de bâtiments emblématiques mais abandonnés de la ville de Bastia : l'hôtel Ile de Beauté, la prison Sainte-Claire, le couvent Saint-François et la congrégation du Bon Pasteur.

Des textes de Marie Ferranti, Romain Giorgi, Paul Turchi-Duriani et Pierre Savelli illustrent aussi l'exposition et le livre qui en est tiré.

Il faut beaucoup d’amour pour arriver à inscrire dans la rétine et sur la pellicule les vestiges des fantômes du passé. Il faut aussi une idée que l’on caresse avant de la façonner. Il faut ensuite de la détermination et toute la science du choix pour la magnifier.

Il est nécessaire d’avoir beaucoup d’amour pour ces murs anciens, pour ces pierres exsangues. Le talent est essentiel afin que la lumière puisse venir lier le cœur et l’œil dans ces images. Armand Luciani a fait œuvre de témoignage de cette lumière. Et c’est ainsi que les Ténèbres ne saisiront plus jamais ces endroits désertés. La mort va fuir loin de ces toits éventrés, de ces murs bafoués et de ces secrets murés. Elle va s’éloigner car le photographe vient invoquer ici non pas les vestiges des temps jadis mais bien la vie qui y réside encore, pour la sublimer.

Per rinvvivisce sta vita sdegnata. En appelant la mémoire de ceux qui ont vécu ces lieux, pour leur plus grande souffrance ou pour des instants de joie, par la mélancolie et le souvenir, le photographe invoque le mouvement dans ces instants figés pour ressusciter les mots chuchotés au détour de ces couloirs désormais ignorés, ces prières presque muettes et ces espérances étouffées. Ceux qui ont habité ces cloisons et qui sont aujourd’hui habités par elles le savent bien. Nous laissons toujours un peu de nous dans ces lieux que nous traversons. Nous sommes un peu d’eux. Ils sont un peu de nous. Et de cette recette alchimique nait la persistance rétinienne, ce croisement entre deux mondes, ce qui a été et ce qui est, dont le photographe se fait le réceptacle et le catalyseur.

Il est bien seul, ce photographe, entre ces murs qui furent écrins, luxe ou prison. Il est seul sur ce chemin abandonné par les hommes mais il n’est pas égoïste. Il nous dit « Venez ! » et il nous dit « Voyez ! » pour que nous puissions mieux dire « Vivons ! ». Et c’est bien là toute la réussite de cet ouvrage, cette anamnèse puissante. Pour rendre la mémoire éternelle. Per rende sti lochi immurtali.

Paul Turchi-Duriani